lundi 25 février 2013

LES JOURNEES DU PATRIMOINE



Dans ce blog satirique, les personnages sont sortis de l'imaginaire et de stricte invention :
Toute ressemblance avec des personnes existant ou ayant existé et toute homonymie avec des noms propres et des noms de lieux privés ne serait que pure coïncidence.







Ne trouvez-vous pas, Anor, que Garsson est superbe d'ici ?


Voilà près de vingt ans que des bénévoles se sont transformés en travailleurs du bâtiment afin de rénover le manoir de Saint-Guy, le cloître ainsi que la chapelle jouxtant ce fief de la seigneurie du coin. Le manoir et la chapelle ouvrent, chaque année, un dimanche à la mi-septembre, leurs portes aux nombreux visiteurs de la Journée du Patrimoine


Depuis ce matin, il y a foule autour des bâtiments, dans les salles du manoir, dans le cloître et la chapelle ainsi que dans le jardin et dans le parc.

De la grande salle à manger autrefois noircie par la cheminée monumentale, on découvre cette magnifique pièce rénovée et pleine de lumière attirant la foule des visiteurs d'un instant.

C'est une immense satisfaction pour ceux qui ont pétri, décoré, peint et façonné de leurs mains le grand édifice.  Nous les avons vu à l'œuvre. C'est un bel ouvrage et cet extraordinaire travail de rénovation est une leçon. 

A l'ombre du Manoir, il y a le four banal auprès duquel des tables sont dressées sur des tréteaux. On l'appelle un four banal non pas qu'il soit dépourvu d'originalité mais dans l'ancien Régime, à l'époque du système féodal français, le seigneur était chargé d'entretenir et de mettre à disposition de tout habitant de la seigneurie, des installations (ici c'est un four, ailleurs cela peut être un moulin ou un pressoir, etc..). En contrepartie, si les habitants utilisaient ces installations, ils devaient s'acquitter d'une banalité, c'est-à-dire une redevance. Heureusement, ces monopoles ont été abolis et déclarés rachetables comme tous les autres privilèges dans la nuit du 4 août 1789. Dans le droit de l'ancien Régime, banal s'oppose à communal. Donc voilà, à Garsson, deux cents ans plus tard, le four banal est devenu rachetable et communal. 


Les bénévoles autour du four s'activent pour confectionner des pâtés aux prunes. Sur les tables, les paniers d'œufs voisinent avec ceux des reines-claudes ainsi qu'avec des bocaux de sucre et de farine. Des femmes pétrissent des longueurs de pâte tandis que le four allumé attend la suite. Il y a de la fébrilité dans l'air.

Des visiteurs s'approchent-ils pour regarder ce qui s'y passe qu'aussitôt ils sont mis à l'écart par un petit monsieur " frais un gardon, gai comme un pinson" : au festin de la curiosité, c'est comme à un grand repas de battage, on n'autorise pas les convives à soulever le couvercle où le ragoût mijote. 

Alors, les promeneurs s'éloignent pour déambuler dans le parc admirant les arbres séculiers. La propriété qui entoure le manoir borde la rivière : celui-ci surplombe la vallée de la Pris. L'endroit est donc fort agréable et fait la fierté de Garsson.  




carte humoristique

La chapelle et le petit cloître qui jouxtent l'édifice sont situés en contre-bas du Manoir, près de la rivière où actuellement se déroule une démonstration de débardage avec un cheval de trait donc très intéressant :  le tronc d'arbre abattu est transporté par le cheval au moyen de chaînes. Le cheval est guidé par des gestes précis de l'exploitant forestier, il ne fait pas de bruit de moteur et il ne pollue pas. Les écolos sont dans la béatitude.

Dans le jardin du Manoir, il y a grande agitation : un autre cheval de trait fait une démonstration de labourage ("Labourage et Pâturage sont les deux mamelles de la France" aimait à répéter Sully, le ministre du bon roi Henri IV). Là, nous y sommes, beaucoup d'anciens de Garsson et des alentours sont là, devenus le temps de quelques heures, des badauds, intéressés et émus devant ces travaux qui font "remonter le temps".   

Enfin, le signal est donné, les visiteurs sont invités à venir déguster. Déjà, par petits groupes, ils s'installent autour des tables qui ont été revêtues de nappes pour la circonstance, disputant aux guêpes leur part de pâté aux prunes. 

Jusqu'à la fin du XIXᵉ siècle, les châtelains entretenaient le Manoir et la chapelle attenante tandis que le cloître servait de grange. Ils menaient également grande vie dans la capitale, alors ils se sont débarrassés de leurs biens ; ils ont fait une proposition au Maire et c'est ainsi que le Manoir, la chapelle, le cloître sont rentrés dans le patrimoine communal.

Les bénévoles ont colonisé le Manoir, les touristes du dimanche sont amoureux de la chapelle et le cloître est devenu une annexe de la Mairie. Les moniales ont déserté les lieux depuis belle lurette et désormais ce sont les employés communaux qui les ont remplacées tandis que le portrait du président de la République trône à la place des images pieuses. A chacun son seigneur.

Les châtelains sont repartis dans la capitale et sans le billet de retour pour mener leur vie de bâton de chaise. La morale de l'histoire ne tient-elle pas dans un proverbe populaire :

"L'abbaye est bien pauvre quand les Moines vont aux glands".  











   


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